Château du Schoeneck association Cun Ulmer Grün
SCHOENECK OU LES AMBITIONS DES DURCKHEIM

L'état du château fort en 1517

Le château fort de Schoeneck est situé près de l'actuelle frontière qui sépare l'Alsace et le Palatinat, non loin de Dambach, 
dans une zone de forte concentration castrale. Les premières années de la forteresse restent largement dans l'ombre, faute de 
sources suffisamment solides et nombreuses. Elle est possession de l'évêque de Strasbourg dès la fin du XIIe siècle, et 
inféodée aux Lichtenberg de 1301 jusqu'en 1480, date de l'extinction de cette famille.

Le comte de Hanau, Philippe 1 l'Ancien, et le comte de Deux-Ponts-Bitche, Simon Wecker IV, étaient les légitimes héritiers de 
Jacques, le dernier des Lichtenberg. Dans la lettre d'investiture de l'évêque de Strasbourg en faveur des deux comtes, il est 
question du Schoeneck, qualifié de "Burg"; il est difficile de tirer des conclusions sur l'état du château fort en 1480, 
considérant que le sens de ce mot reste assez vague. Les lettres de fiefs reprennent souvent les termes de documents plus 
anciens, que l'on se contentait de recopier sans tenir compte des possibles modifications intervenues dans l'intervalle. L'état 
de la construction ne doit pas être des plus brillants, car on sait que le Schoeneck est qualifié de château fort en ruine 
("verfallene schloss") en 1517. Lors du partage des terres des Lichtenberg, la seigneurie de Schoeneck est attribuée aux 
Deux-Ponts-Bitche. On peut avancer deux possibilités concernant la forteresse à cette époque: soit ces nobles reçurent un 
château fort en mauvais état, ou bien il fut particulièrement mal entretenu entre 1480 et 1517. L'état de décrépitude est 
également souligné par la charte épiscopale confirmant l'investiture de Wolf Eckbrecht de Durckheim par Reinhard de 
Deux-Ponts-Bitche. L'évêque Guillaume de Honstein, soucieux de l'administration et de la défense des territoires dont il est le 
suzerain, ordonne la reconstruction (et la transformation) du château fort. Cette pratique n'est pas un cas isolé. En 1419, les 
sires d'Altdorf, recevant en fief le Nouveau-Windstein des mains de l'évêque de Spire, devaient déjà s'engager à construire une 
muraille autour de ce château fort. Guillaume de Honstein se préoccupa aussi de la restauration du Haut-Barr dans le cadre du 
renforcement de la principauté épiscopale. Pourquoi cette condition de la reconstruction du Schoeneck ? On peut mettre en 
avant le climat de tension croissante qui prépara la guerre des Paysans de 1525 (entre autres les mouvements de 1493, 1514 et 
1517). Pour sa part, Reinhard de Deux-Ponts-Bitche parle du château fort, sans se préoccuper apparemment de son état.


Les Durckheim, l'Alsace du Nord et la seigneurie de Schoeneck

Les Durckheim sont une vieille famille noble, originaire du Palatinat. L'un des leurs fut évêque de Worms au milieu du XIIIe 
siècle. Ils se mirent très tôt au service de la famille palatine. Dans cette région, ils possédaient des biens à titre de fiefs palatins
(entre Pirmasens et Landau). On peut citer les villages de Busenberg, d'Erlebach, de Baerenbronn et une partie du château fort
de Drachemels. Les Durckheim sont prescrits dans le Nord de l'Alsace dès le XVe siècle. Ils y tiennent différents villages en tant
que fiefs de l'évêque de Strasbourg (Nehwiller, Froeschwiller, Elsasshausen); Langensoultzbach est progressivement intégré 
aux biens de cette famille aux XVIe et XVIIe siècles. Dès le milieu du XIVe siècle, les Durckheim détenaient des droits aux deux 
Windstein, comme parents ou héritiers des Windstein. Les parts appartenant aux Durckheim et aux autres lignages furent 
rachetées par l'évêque de Spire, suzerain des lieux (en 1390 pour ce qui est des Durckheim). Le Nouveau-Windstein est confié 
à Hans von Altdorf et son fils Heinrich en 1419; les sires d'Altdorf conservent ce fief jusqu'en 1633. A partir de 1648, le 
Nouveau-Windstein (ruiné ou abandonné entre 1635 et 1729 ?) fait partie des possessions des Durckheim. En 1542, la moitié du
Hohenfels (ruiné vers 1525 ?) avec ses forêts ainsi qu'une partie de Dambach, passent aux Durckheim, qui possédaient déjà 
l'autre moitié du château fort. Les deux forteresses voisines du Schoeneck, Wineck (Windeck) et Wittschlôssel (Wittschloss), 
sont intégrées aux biens familiaux au moins dès la fin du XVe siècle. Ces deux constructions (pour Wittschlôssel s'agissait il 
d'un château fort dans toute l'acception ou d'une simple tour de guet ?) sont vraisemblablement délaissées dès la fin du Moyen
Age. Ce lignage détenait encore plusieurs droits et terres en Alsace, des fiefs impériaux à Haguenau, le titre de Burgvogt 
impérial de Haguenau. Ces petits nobles accroissent progressivement leur patrimoine. En 1664, ils font des démarches pour 
l'inscription de leur famille dans la noblesse immédiate de Basse Alsace; elle sera effective en 1699.

 L'inféodation de la seigneurie de Schoeneck en 1517 s'inscrit dans cette politique d'accroissement territorial. Le bénéficiaire, 
Wolff Eckbrecht von Dürckheim, y est qualifié de serviteur (''diener"). Ce statut se rattache à un cadre social marqué par la 
féodalité dite bâtarde. A la fin du Moyen Age les obligations féodales ne permettaient plus de s'attacher la loyauté de vassaux, 
plus enclins à renforcer leur patrimoine qu'à servir les intérêts des seigneurs. De nouveaux statuts sont progressivement mis 
en place dans les grandes seigneuries à partir du XVe siècle, afin de fidéliser la noblesse: ainsi apparaissent les Diener,  de 
Bavière et du Palatinat. Hommes de confiance engagés pour un temps déterminé, ils doivent se soumettre à des obligations 
explicitement spécifiées, en général une aide militaire avec plusieurs soldats; un salaire rémunère ces services, de même 
protection leur est accordée. Dans le cas précis de Durckheim, Diener  à vie des Deux-Ponts-Bitche, c'est le fief qui fait office 
de rémunération. Ses obligations sont très clairement indiquées, Pour le service du comte, il s'engage à envoyer deux 
chevaliers même au cas où il ne pourrait pas personnellement venir Reinhard de Deux-Ponts-Bitche promet de fournir entre 
autres des vêtements à son feudataire. Tous ces aspects, qui soulignent le statut de Diener et les obligations qui en découlent,
disparaissent dans les lettres d'investiture postérieures.

Les terres, villages et droits divers, rattachés à la seigneurie de Schoeneck renforcent considérablement la présence de ce 
lignage dans la vallée du Schwarzbach. Ce sont surtout les zones boisées qui constituent la principale richesse de la 
seigneurie. Cette acquisition donne de toute évidence une assise solide aux Durckheim en Alsace du Nord.

Bien que seul bénéficiaire de l'acte d'inféodation de 1517, Wolf Eckbrecht de Durckheim n'est pas le seul maître du château fort
et de l'ensemble de la seigneurie de Schoeneck. En effet une paix castrale est conclue la même année entre les Durckheim et 
Frederich Steinhuser zu Neydenfelss (ou Neidenfels). Les deux contractants jurent de respecter les clauses de cette paix, qui 
assure aux deux lignages la possession de la forteresse et des biens rattachés. S'agit-il de notre Schoeneck ? La date de 1517,
le nom de Wolffgang Eckprecht von Dürckheym constituent des indices sérieux. Ils sont renforcés par un passage de la paix 
castrale, qui précise que les litiges éventuels entre les deux parties devront être tranchés par le comte palatin, l'évêque de 
Strasbourg, ou le comte de Bitche. On sait que la seigneurie dépend du comté de Deux-Ponts-Bitche, l'évêque de Strasbourg 
étant le suzerain. La présence de la famille palatine ne doit pas surprendre; ce sont des voisins puissants auxquels sont liés les
Durckheim pour certaines de leurs possessions. Wolf Eckbrecht de Durckheim épousa en premières noces Agathe, fille de 
Philippe Schluchterer d'Erpfenstein et d'Elisabeth Steinhuser de Neidenfels. Sa sœur Dorothée était mariée à Frédéric 
Steinhuser de Neidenfels. Un château fort de Neidenfels se trouve au Palatinat, au Nord-Ouest de Neustadt. Cette famille 
n'apparaît dans aucun autre document sur le Schoeneck; sa présence dut être passagère. Le cas le plus vraisemblable serait 
l'existence d'un gage ou d'une vente au profit des Neidenfels, déjà liés par la patente aux Durckheim. Dans sa lettre de 
confirmation en 1517, l'évêque Guillaume de Honstein pose à deux reprises la restauration du château fort comme condition de 
l'investiture. Ne disposant probablement pas des fonds nécessaires pour cette coûteuse opération, Durckheim dut sans doute 
mettre en gage une partie de la seigneurie, à moins qu'il n'en vendit une partie; ce gage ou cette part dut être bientôt racheté 
pour tomber aussi vite dans l'oubli.

Hormis le mauvais état du château fort en 1517 comme il apparaît à travers certains textes, on ne connaît pratiquement rien sur
son aspect, la vie quotidienne qu'y menaient les châtelains et la garnison. A propos du droit d'ouverture et de la fidélité dus à 
l'évêque de Strasbourg, on apprend que tous les occupants du Schoeneck doivent respecter ces clauses: le bailli et quiconque 
résidant dans la forteresse. La garnison choisie par les deux contractants de la paix castrale, devra prêter serment de la 
respecter comme tous ceux qui voudront pénétrer dans l'enceinte fortifiée. Dans les clauses de la paix castrale de 1517, on 
apprend que les tâches et obligations des contractants sont partagées. L'armement reste dans l'ombre. Seule la paix castrale 
nous fait part de l'existence d'armes blanches et à feu ("gesthuklukit mit Bugsen pulver und andere"), dont l'entretien, et 
l'usage sont communs.


Des travaux au château fort

Il est généralement admis que les Durckheim entreprennent la restauration du Schoeneck après 1517. Jean-Daniel Schoepflin 
émet des doutes sur cette reconstruction qu'il situe au XVIIe siècle. Jean-Georges Schweighauser se base sur les traditions de 
la famille pour défendre l'existence de travaux. Cette entreprise s'inscrit parfaitement dans la "renaissance des châteaux de 
montagne" décrite par Jean Wirth. La restauration de la forteresse passa par l'adaptation à l'art militaire du début du XVIe 
siècle. Les textes font malheureusement défaut pour la situer avec plus de précision et saisir l'ampleur des travaux. Les 
investitures de 1533, 1541 et 1572, se contentent de signaler le Schoeneck, sans donner d'indications sur son état ou 
l'avancement des travaux. Ceci n'a rien de singulier pour une lettre d'inféodation, où l'on se contentait de recopier des 
documents plus anciens. On sait qu'il existait des pierres portant les dates 1545 et 1547; un bloc portant le millésime 1592 fut 
également retrouvé. On peut en déduire que cette reconstruction ou ces travaux successifs se prolongèrent jusqu'à la fin du 
XVIe siècle.

On peut distinguer plusieurs raisons pour expliquer ces travaux. Les directives de Guillaume de Honstein peuvent être 
considérées comme déterminantes. La restauration du Schoeneck est la principale condition que pose l'évêque pour approuver
l'investiture des Durckheim. Il existe des raisons plus profondes à cette entreprise. Les Durckheim sont en expansion depuis le 
XVe siècle; en plus des possessions au Palatinat, cette famille réussit à accroître ses droits en Alsace du Nord jusqu'au XVIIe 
siècle. Pour asseoir leur autorité, gérer leurs biens, ils ont besoin de points d'appui administratifs. Centre de la seigneurie qui 
porte son nom, le Schoeneck joue ce rôle. Il était naturel de le restaurer pour permettre l'installation d'un bailli; par contre ce 
château fort ne semble servir qu'épisodiquement de résidence aux Durckheim, sauf pendant les guerres du XVIIe siècle. Faut-il 
réduire le Schoeneck à cette seule fonction ? Comment expliquer une tentative sérieuse d'adaptation à l'art militaire du temps ?
Affirmer son autorité à travers l'architecture est une hypothèse qui peut être discutée; on peut soutenir que la possession 
d'une forteresse modernisée, où l'on constate aussi un goût certain du beau avec les frises qui décorent les murs des 
basses-cours, a paru nécessaire pour des raisons surtout symboliques. La lettre d'investiture de 1517 donne des indications 
assez précises sur la vallée du Schwarzbach à cette époque. On sait qu'elle était marécageuse et souvent inondée; il existait un
"Speck" (chemin ou pont de rondin en terrain marécageux), un pont ("brücke") et plusieurs étangs ("Wöge, Wäge"). La 
présence de chemins (" Wege") est attestée, ainsi que celle d'une route allant de Sturzelbronn à Steinbach ("Strass die von 
Stürtzelbron gehn Steinbach gehet"), sur laquelle s'embranchaient sans doute des chemins vers Neunhoffen. Des 
communications existaient peut-être dès cette époque entre la vallée du Schwarzbach et celle du Steinbach, par le vallon étroit 
entre les châteaux forts de Schoeneck et Wineck. En tout cas cette vallée n'a rien d'une grande voie de communication, 
comparable aux grandes artères que sont le val de Villé ou le col de Saverne. Les Durckheim n'ont par conséquent aucunement
besoin d'une forteresse pour surveiller le trafic de cette zone qui reste marginale. Pour comprendre le rôle qu'a pu jouer le 
Schoeneck, il faut étendre géographiquement le champ d'étude. Rapporté à l'ensemble des possessions de ce lignage, le 
château fort représente approximativement le centre de gravité, le pivot à mi-chemin entre les terres du Nord de l'Alsace et 
celles du Palatinat. Cette situation a pu motiver la transformation de la forteresse, reconnue comme pièce-maîtresse de la 
famille. Le choix du Schoeneck est aussi lie à des considérations techniques. Le site, haut de 365 mètres à la base des rochers,
présente des avantages incontestables. Les côtés Sud, Est et Ouest, étaient assez raides pour empêcher ou retarder l'avance 
des troupes ennemies. Le sommet du Fischerberg domine la forteresse à moins de 300 mètres; la pente raide, le terrain 
fortement boisé, interdisaient à toute artillerie lourde de s'y installer pour canonner le Schoeneck. on peut faire la même 
remarque pour les sommets environnants, présentant tous une forte déclivité. Il faut également observer que la situation à 
l'échelle de la vallée constitue aussi un atout. La circulation pour une armée en campagne devait y être délicate. De plus le 
Schoeneck est encore niché dans un vallon isolé; un rapport français de 1680 souligne cet isolement: "tellement environné de 
montagnes et de bois qu'il y a du moins six lieues de là à la plaine plus prochaine". Fallait-il encore que l'assaillant ait ces 
canons, le matériel d'approche, les cantonniers et les pontonniers nécessaires. Les Durckheim entretenaient par ailleurs de 
bonnes relations avec les puissants susceptibles de mettre en oeuvre ces moyens, et au service desquels ils se mettaient. il ne
faut donc pas surestimer le rôle militaire que pouvait être amené à jouer le Schoeneck.

Différentes transformations rendues nécessaires par l'introduction des armes à feu peuvent être observées, sans pouvoir être 
datées avec précision, mais vraisemblablement postérieures à 1517. Elles furent réalisées en plusieurs étapes successives 
comme le confirment les dates de 1545, 1547 et 1592.

L'entrée Sud du château fort, avec sa barbacane et ses deux ouvrages avancés (construits sur plusieurs étages ?), présente 
un intérêt évident. L'organisation des défenses est conçue de façon judicieuse. Particulièrement menacé, ce front décrit un 
angle rentrant au niveau de la langue rocheuse médiane. De ce fait tous les dispositifs concentraient leurs feux vers l'entrée et 
croisaient leurs tirs sur l'esplanade. De nombreuses meurtrières protègent l'accès et assurent un flanquement satisfaisant de la
porte. Elles sont de tonnes variées, et sont exclusivement conçues pour des armes de petit calibre. Certaines sont réalisées 
avec beaucoup de raffinement, comme celles des deux ouvrages avancés; les pierres à bossage qui entourent les embrasures 
constituent un ornement certain, mais faisaient également ricocher les projectiles ennemis; ces meurtrières sont façonnées 
avec beaucoup de soin, et couvrent un large champ de tir. L'utile est ici associé à l'agréable.

 Le château fort présente également plusieurs tours flanquantes conçues pour le maniement des armes à feu. Le mur 
d'enceinte de la basse-cour orientale en compte deux. La plus méridionale flanque tout le côté Est de la forteresse. L'ouvrage 
n'est pas conservé sur toute sa hauteur. Trois embrasures au minimum permettaient un tir plongeant et flanquant. Une tour 
extérieurement de forme polygonale est conservée à l'angle du mur Est et Nord. Elle est plaquée contre l'enceinte qui lui est 
par conséquent antérieure. Conservées sur deux niveaux, les meurtrières sont composées de simples montants dessinant une 
fente verticale. Elles sont très différentes des autres types que l'on rencontre sur ce site. Étaient-elles véritablement étudiées 
pour l'utilisation d'armes à feu ? il faut remarquer à ce propos que les créneaux de mousqueterie adoptés dans la fortification 
bastionnée classique ressemblent à ce type d'embrasures. Le dispositif le plus remarquable est situé sur le côté occidental. 
Une imposante tour d'artillerie est littéralement accrochée au rocher sur lequel se développaient des constructions aujourd'hui 
pratiquement totalement ruinées. Quatre canonnières permettraient des tirs à distance et de flanquement  dans toutes les 
directions, sur deux étages (le niveau inférieur n'est pas accessible). Les deux dispositifs de l'étage supérieur présentent un 
trumeau central, qui sépare deux directions de tir et assure la solidité de ces embrasures. Une profonde niche voûtée prolonge 
les canonnières proprement dites. Vu l'épaisseur des murs, (jusqu'à 3 mètres du côté Nord), cette tour était capable de résister
aux canons ennemis, par ailleurs difficiles à installer à proximité. La surface permettait l'installation de plusieurs pièces pour 
contrebattre l'ennemi, et surtout mitrailler les assaillants avançant vers les murs. Une autre tour aux dimensions plus 
modestes, équipée d'embrasures pour armes légères, assure le flanquement  du front Ouest, de concert avec une meurtrière 
placée dans le décrochement du mur d'enceinte de la basse-cour occidentale.

 L'étroite zone comprise entre la grande tour d'artillerie et la petite tour de la basse-cour Ouest, permet d'apprécier 
l'importance donnée à la lutte contre les angles morts. Le secteur est fortement défendu sur plusieurs niveaux par des tirs 
rasants, plongeants et verticaux. Les projectiles étaient tirés depuis les canonnières de la grande tour, les meurtrières de la 
tour d'angle, ainsi que par quatre embrasures situées dans le pan de courtine compris entre les ouvrages susnommés. Il ne 
faut pas vouloir chercher de savants calculs et une théorie bien établie du flanquement; ici on essayait plutôt de résoudre le 
problème de façon empirique, mais avec une réelle efficacité.

 Outre les canonnières de la grande tour d'artillerie et les meurtrières en forme de gueule des deux ouvrages Sud, on trouve 
d'autres types d'embrasures pour armes à feu. On observe une meurtrière en trou de serrure dans l'échauguette-bretèche qui 
surmonte la porte d'entrée de la basse-cour orientale; ce dispositif est semblable à celui qui protège la zone déjà évoquée entre
la tour d'artillerie Ouest et la tour d'angle. Parmi celles qui sont conservées, les plus nombreuses se présentent extérieurement
sous la forme d'un rectangle allongé et étroit, se rétrécissant vers l'intérieur. Un large champ de tir est ainsi assuré, de même 
qu'une bonne sécurité du tireur s'agissant pour la plupart d'embrasures pour armes portatives. Une petite niche permettait à 
l'arquebusier de déposer ses accessoires, et de manier son arme avec un maximum de confort dans la direction choisie.

 On remarque l'appareil soigné de plusieurs murs. Les murailles en grand appareil lisse, bordant les deux basses-cours, sont 
caractéristiques du XVIe siècle en Alsace. On constate un contraste assez marqué entre ces murs, et certains ouvrages 
souvent en moellons avec des assises irrégulières. On note aussi des appareils différents pour le front Sud, qui fit l'objet de 
renforcements et de remaniements successifs: les murs prolongeant la basse-cour orientale, avec la porte murée masquée par 
l'ouvrage Sud-est, et l'enceinte occidentale bordant la fosse d'entrée.

 Ces remarques concernent le corps principal du château fort, tel qu'on le découvre actuellement. Réalisé il y a un siècle, le 
plan établi par Julius Naeher est très utile, car il attire notre attention sur des structures pratiquement disparues. Ce relevé 
indique que l'esplanade en avant de l'entrée Sud et le côté Ouest de la forteresse étaient entièrement clôturés par des braies; 
un chemin d'accès en épingle à cheveux permettait de pénétrer sur cette esplanade. En moellons plus ou moins grossièrement 
appareillés, quelques pans conservés sur une faible hauteur témoignent encore aujourd'hui de l'existence de telles structures; 
il ne faut pas les confondre avec les amoncellements de pierres résultant de la destruction du château fort, et des travaux 
successifs de restauration anciens et récents. Ces murs sont de faible épaisseur (50 cm environ). Ils étaient peut-être 
complétés par des éléments en bois, sous forme de palissades. Nous avons remarqué la présence de semblables vestiges sur 
le flanc Est de la forteresse. Cependant, ils sont trop insignifiants pour se prêter à une étude plus fine, en l'absence de 
recherches archéologiques dans ce secteur. La question des éventuelles fausses braies reste ouverte. Robert Will ne retient 
pas cette hypothèse. Pour l'auteur les deux basses-cours et leurs murs enserrant la table rocheuse, remplissent 
respectivement les rôles de lices et de braies. D'autres explications concernant ces vestiges peuvent être retenues. Etant 
donné la forte pente entourant le site, il pourrait s'agir de murets simplement destinés à retenir le sol, afin de maintenir une aire
de circulation stable autour de la forteresse; on peut soutenir cette idée dans la mesure où ils ne sont conservés que sur une 
très faible hauteur.


Le XVIIe siècle: les guerres et l'incendie de 1663


 Le rôle du château fort est plutôt réduit pendant la guerre de Trente Ans. Son isolement le protégea contre les raids des 
différents belligérants. Il semble avoir surtout servi de refuge aux populations des environs, ce que confirme un document de 
1663. Dans le même texte, il est aussi précisé que ce château fort a pu remplir cette mission grâce à ses fortifications ("um 
seiner befestigung willen"). Bien que résidant habituellement à Froeschwiller, les Durckheim y firent des séjours plus ou moins 
longs en ces temps troublés. Les prétentions militaires du Schoeneck étaient par conséquent réduites à un rôle plutôt passif. 
La paix revenue, la garnison n'était composée que de quelques soldats.

 Un incendie accidentel ravage le château fort le 22 mars 1663; il s'agissait d'un feu de forêt qui se propagea aux constructions.
Un texte du 30 mars adressé à la Régence de Bouxwiller (après 1570 la seigneurie de Schoeneck passa aux comtes de 
Hanau-Lichtenberg) donne des indications précises sur l'ampleur du sinistre. On y apprend que les voûtes, les portes, les 
ponts-levis sont détruits; le mobilier et les registres sont perdus. Cette description énumère les dommages subis avec un sens 
très travaillé du dramatique; n'y a-t-il pas quelque exagération dans ce récit ? En effet il faut souligner que le destinataire est le 
comte de Hanau-Lichtenberg, auquel s'adressent les Durckheim pour arracher des subsides. Cet incendie est attesté 
archéologiquement; il apparaît dans la stratigraphie de la fosse d'entrée Sud, fouillée par l'Ecole d'Architecture de Strasbourg. 
Annoncer simplement cette catastrophe ne suffisait pas. Wolf Frédéric de Durckheim avance des arguments pour présenter cet
incendie comme préjudiciable à toute la région; le Schoeneck ne pourra plus remplir sa fonction de refuge pour les populations 
sans ces fortifications. Afin de permettre une reconstruction dans les plus brefs délais, Durckheim demande une subvention 
(''beysteur'') aux Hanau-Lichtenberg, comme à tous les seigneurs voisins. Le comte Johann Ludwig von Leiningen (Linange) lui
a déjà promis son soutien.

 On sait que les Durckheim connaissent des difficultés financières à cette date. La réponse de la Régence ne fut pas favorable; 
dans un document du 25 avril, on apprend qu'elle repousse la demande de subvention de 100 écus d'argent, alléguant qu'il ne 
s'agissait pas d'une urgence et qu'il ne fallait pas exagérer le rôle du château fort. Dans une lettre du 26 mai, Durckheim 
formule le souhait du versement prochain de cette subvention, et demande une grue pour soulever les pierres. On ne sait pas 
si l'argent fut versé et dans quels délais. Considérant le nombre de lettres envoyées par les Durckheim à Bouxwiller on peut 
saisir l'intérêt que porte cette famille à un château fort, encore au milieu du XVIIe siècle. Les Durckheim croient-ils encore à la 
valeur militaire de ce type de construction, ou voient-ils plutôt le symbole d'une certaine indépendance ? Les deux facteurs ont 
pu se superposer. Cette reconstruction tant souhaitée fut-elle menée à bien ? Il est difficile d'apprécier les travaux. Une 
approche a été tentée pour le front Sud, à partir de l'étude des couches archéologiques de la fosse d'entrée. Cette 
reconstruction fut sans doute très partielle, se limitant au strict minimum. Les Durckheim n'avaient de toute évidence plus les 
moyens financiers de leurs ambitions politiques.

 Plusieurs documents apportent des indications sur le rôle joué par le Schoeneck au cours du rattachement progressif de 
l'ensemble de l'Alsace au royaume de France. On sait que les Durckheim sont des serviteurs fidèles des Palatins. Ils obtiennent
des charges à la cour de l'Electeur, ou des commandements dans ses armées. Wolf Frédéric fut colonel du régiment palatin 
Isenburg et gouverneur du comté de Sponheim. Des soldats de cette formation sont placés en garnison au Schoeneck et 
peut-être aux deux Windstein. Ennemi de Louis XIV, l'Electeur charge son serviteur de combattre les troupes royales. 
Wolf-Fredéric de Durckheim se servit de cette mission pour défendre au mieux ses propres territoires, cherchant par là à 
maintenir l'indépendance de ses possessions. Deux lettres envoyées à la Régence de Saverne en 1673 sont des demandes en 
vue d'une lettre de sauvegarde épiscopale pour ses terres et le Schoeneck en particulier; on sait à partir d'un document de 
1674 qu'elle fut refusée. Le rôle dévolu au Schoeneck durant cette période ne semble pas différent de celui joué pendant la 
guerre de Trente Ans. Un rapport détaille sur les événements de 1674 donne plusieurs informations. La menace française se 
précise. Les Durckheim quittent Froeschwiller qualifié de résidence ordinaire, et se retirent au Schoeneck avec les populations 
des environs. Devant la menace d'une attaque d'un corps français de 500 hommes, l'Electeur palatin accorde 30 soldats, mais 
demande bientôt le retrait de son contingent. Les opérations de harcèlement des troupes royales et les entreprises de 
ravitaillement se succèdent. On apprend qu'un détachement de 15 soldats est envoyé pour harceler l'ennemi; une autre fois 55 
hommes sont chargés d'une mission. S'agissait-il toujours de troupes exclusivement cantonnées au Schoeneck ? Rien n'est 
moins sur; en effet on sait que Durckheim commandait à cette époque la garnison de Schoeneck, mais aussi celle de 
Fleckenstein.

 Il n'est jamais question des châteaux forts de Windstein, encore moins de garnisons installées dans leurs enceintes; ceux-ci 
sont progressivement abandonnés au cours du XVIIe siècle. Cet abandon n'est pas lié à des événement militaires, comme le 
veut la tradition populaire. L'attitude des Hanau-Lichtenberg à cette époque paraît plutôt ambiguë. La Régence de Bouxwiller 
refuse les quelques hommes demandés par Durckheim afin de renforcer le Schoeneck. De plus, leurs troupes se livrent à des 
actes d'agression notoire contre leurs vassaux. Un rapport contient les plaintes de ces derniers pour 1674. Des soldats 
attaquent le château fort sans succès. Ils pillent surtout les environs, saccagent les habitations de Neunhoffen. Mieux, ces 
troupes vont jusqu'à soudoyer la garnison du château fort, pour faire assassiner Wolf Frédéric de Durckheim ("durch 
offerirung vielen gelds den von Turckheim umbzubringen"). Cette sombre anecdote en dit long sur la confiance que l'on 
pouvait avoir dans une garnison, peu motivée et faiblement expérimentée. On peut essayer d'expliquer cette attitude 
passablement agressive. Il semble que des heurts fréquents aient eu lieu lors des réquisitions effectuées par les soldats de 
Durckheim sur les terres des Hanau-Lichtenberg; ainsi il pourrait s'agir de mesures de représailles pour punir le zèle trop 
ardent déployé lors de ces opérations. Le comportement des Hanau-Lichtenberg vis-à-vis de la souveraineté française, bientôt 
inévitable, est aussi ambigu; ils paraissent plutôt agacés par la fougue guerrière des Durckheim.

 La garnison du Schoeneck réussit à repousser une attaque du marquis de Vaubrun en 1676. Dans une lettre de 1680, adressée
à la Régence de Saverne, Durckheim rapporte que l'Electeur palatin a cherché à plusieurs reprises à retirer son contingent du 
château fort. Wolf-Frédéric de Durckheim réside à Froeschwiller au moins jusqu'en avril 1680 ; il quitte la région au cours du 
mois d'avril ou de mai. A partir du 29 avril 1680, le Schoeneck est occupé par les troupes françaises ; Froeschwiller est aussi 
investi. L'utilisation de la formule "belegt" (mettre garnison dans) nous incline à croire qu'aucun combat ne fut livré autour du 
château fort. Il a probablement été évacué au moment de la fuite des Durckheim au Palatinat. Pourtant dans son document 
français de 1680, il est souligné que les murs de la forteresse n'étant pas assez épais "on en a pu prendre". Y a-t-il eu une 
résistance en 1680 ? On ne peut le dire avec certitude à partir des documents conservés. Les possessions alsaciennes des 
Durckheim sont confisquées; ceux-ci s'en plaignent auprès de l'évêque de Strasbourg. Elles furent restituées par la suite à 
leurs propriétaires. Les Durckheim paraissent s'être assez bien accommodés de la tutelle française. L'inscription de cette 
famille dans la noblesse immédiate de Basse Alsace est effective en 1699. Elle entraînait la reconnaissance de la souveraineté 
française par la prestation d'un serment de fidélité. La mort de Wolf Frédéric en 1698, qualifié de "grand voleur de sa 
profession" par les Français en 1680, n'est probablement pas étrangère à cet apaisement.

 Avant la destruction du château fort en novembre 1680, un dernier document donne des renseignements sur son état au 
moment de l'installation des troupes royales. Les constructions sur le rocher sont abandonnées. Les murailles entourant la 
barre gréseuse sont en meilleur état, "fort élevées". Il n'est à aucun moment question d'une deuxième enceinte basse ou de 
murets de retenue. De nombreuses portes et des ponts-levis doubles sont aussi signalés. Les bâtiments (les logements, la 
boulangerie, les écuries) sont pour la plupart dépourvus de toitures. Cette remarque laisse penser que le château fort est plus 
ou moins à l'abandon en 1680, ou très faiblement occupé. La faible épaisseur des murailles, l'absence de fossés (celui du côté 
Nord est ignoré), la pente jugée trop faible (sur le côté Sud les courbes de niveaux sont moins resserrées qu'ailleurs), le relief 
environnant dominant la forteresse, sont jugés comme "défauts considérables". Pourtant remis facilement en état, le 
Schoeneck pourrait accueillir plus de 150 soldats et 50 chevaux, et se "faire marchander même avec de gros canons". Sur le 
plan strictement technique, les remarques positives et négatives se contrebalancent globalement. Ce sont des considérations 
stratégiques, comme son éloignement de la plaine, et les coûts financiers, qui déterminent le jugement suivant: "mon avis est 
de le raser raz pied et raz terre". Témoin de la destruction, un tunnel de sape est visible à la base de la grande tour d'artillerie 
Ouest. Les matériaux découverts dans la fosse d'entrée Sud confirment ce démantèlement: on y trouve des éléments de 
maçonneries; des bardeaux de couverture et du bois de construction ont été brûlés).

 L'année 1517 est une date importante pour les Durckheim, petits nobles actifs, possessionnés en Alsace du Nord et au 
Palatinat. La seigneurie de Schoeneck, avec son château fort, leur est attribuée à titre de fief. Elle est assurément l'une des 
pièces-maîtresses de la vallée du Schwarzbach, qui passe progressivement sous le contrôle de cette famille entre la fin du 
Moyen Age et le XVlIe siècle. Symbole de leur autorité, le Schoeneck est conséquemment reconstruit et transformé selon les 
règles de l'art militaire du temps.

 Leur désir d'indépendance est souvent cité en exemple. Au XVIIe siècle, ils restaurent leur forteresse détruite par un incendie. 
Au cours de la même période, ils sont parmi les adversaires les plus résolus de la France, luttant activement contre la 
souveraineté sans partage qui s'installe dans la région. Ces faits ne reflètent pourtant que partiellement la réalité. Les 
Durckheim dépendent du puissant Electeur palatin qui leur accorde des charges diverses. Au moment de la reconstruction du 
château fort après 1663, Wolf Frédéric de Durckheim fait appel aux Hanau-Lichtenberg. Dans les années 1670-1680, le même 
défend le Schoeneck en qualité d'officier d'un régiment palatin. Certes les Durckheim furent des seigneurs parmi les plus actifs 
de la région; leur réussite territoriale est indéniable et exemplaire. Mais l'histoire du Schoeneck, en particulier dans la deuxième
moitié du XVIIe siècle, démontre que leur ambitions se nourrissaient aussi d'illusions.
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